Blue Planet

La toile de mer


Ébauche de scénario pour Blue Planet, réalisée à l'origine pour le douzième concours de scénarios de la Cour d'Obéron, et présentée ici dans une version mise à jour.
Le thème du concours était une étrange disparition, et l'élément imposé, une toile.


Ce scénario (ou plutôt, cette ébauche de scénario) a pour cadre Poséidon ; mais l'action peut, moyennant quelques adaptations, être transposée vers une planète similaire dans un autre univers de SF interstellaire (Traveller, Empire Galactique, etc...).
Aucune caractéristique technique n'est fournie.
Les choix de traduction sont ceux qui avaient été adoptés lors des deux premières tentatives (avortées) de traduction officielle du jeu en français, en 2001 et 2002.

Les personnages se trouvent sur Poséidon, sans doute à Haven ou dans les environs. Ils peuvent être natifs ou nouveaux arrivants, cela importe peu. Certains d'entre eux peuvent même si besoin est être des Cétacés.
Le groupe doit disposer du minimum de liberté nécessaire pour effectuer des déplacements au sein de l'archipel de Haven (Haven Cluster) et y mener une "enquête". Ceci sous-entend la possession d'un véhicule, du temps libre, et peut-être quelques fonds...

Si vous êtes censés participer à ce scénario en tant que joueurs, ne lisez pas plus loin...


Introduction : une étrange disparition

Franck Warwick était un ami des PJ (et éventuellement un collègue de certains d'entre eux). Un peu excentrique peut-être, étant donné sa fixation sur les Aborigènes, mais un ami très sympathique.
Était, car il a disparu dans des circonstances étranges il y a quelques mois : alors qu'il se rendait de Haven à Newport, en plein c½ur de l'archipel de Haven, sa sauterelle (jumpcraft) a brusquement cessé toute communication et disparu, en pleine mer entre les îles de Paris et Liberté. La mer était calme, la météo au beau fixe dans la zone survolée, la sauterelle de Warwick était bien entretenue et avait d'ailleurs subi sa dernière révision dix jours avant, et rien ne permet d'expliquer cette disparition.
Warwick était enseignant-chercheur à l'Institut scientifique et technologique de Haven (HIST), où il occupait un poste de maître de conférences en biologie marine. Passionné (le mot est faible...) par les Aborigènes, il leur consacrait une bonne partie de ses activités de recherches, et même de ses activités tout court (trop, de l'avis de sa hiérarchie ; et surtout d'Anne Durin, son ex-compagne, qui quant à elle parlait à son sujet d'une véritable obsession maladive, et qui, ne pouvant plus supporter cet état de faits, l'avait finalement quitté quelques mois avant sa disparition) ; et c'est d'ailleurs pour cette raison qu'il se rendait à Newport, où plusieurs personnes avaient récemment déclaré avoir vu ces mystérieuses créatures.

Les moyens dont disposent les forces de l'ordre sur Poséidon étant notoirement insuffisants, la disparition de Warwick n'a fait l'objet d'aucune enquête approfondie.
Les personnages quant à eux ont peut-être mené une enquête indépendante de leur côté (ceci peut éventuellement faire l'objet d'un précédent scénario, ou d'une séquence prégénérique), sans résultat : aucune trace de Warwick ou de sa sauterelle. La disparition est inexplicable, et les personnages peuvent échafauder les hypothèses les plus farfelues, allant d'un missile ayant abattu la sauterelle (mais aucune activité militaire n'a été signalée dans le secteur, la zone est calme, et aucun radar n'a détecté la signature d'une telle arme) aux thèses conspirationnistes ou fantastiques les plus fantaisistes (passage par un micro-trou de ver, enlèvement par des petits gris, attaque d'une créature cthulhienne, ce genre de délires).


L'île de la tente, à Sion
(non, en fait, pas à Sion, mais dans l'archipel de Haven ; mais ça n'aurait pas fait un bon intertitre...)

Mais, quelques mois après ce tragique évènement, un nouvel élément vient changer la donne : un personnage (ou plusieurs, selon la composition du groupe et les activités de ses membres), qui se trouve dans une partie encore relativement vierge d'une des îles de l'archipel de Haven (laquelle précisément importe peu), tombe tout à fait par hasard sur un campement de pêcheurs natifs (absolument pas dissimulé) au sein duquel trône la tente (temporary shelter, Fluid Mechanics pp 39/40) de leur ami, facilement reconnaissable par les motifs très particuliers qui l'ornent (une fresque représentant des animaux marins dans un style tenant quelque peu du cubique, peinte par Anne Durin sur la toile en bioplastique tissé). Or, Franck était certainement parti avec sa tente : les persos vont pouvoir tenter de se remettre sur la trace de leur ami...

Ces natifs ont l'habitude de fréquenter les colons de nouvelle génération, et ne sont pas hostiles aux persos, sauf si ceux-ci se comportent de façon agressive. Il s'agit d'un petit groupe de pêcheurs, venant d'un village situé sur une île proche, qui a fait halte ici après une pêche fructueuse (comme en témoignent les deux carcasses d'hélions (sunbursts) dépecées et leurs peaux qui sèchent au soleil). Le meneur du groupe est un grand osmoforme bronzé qui se nomme Richard Aignan.
Si on leur demande d'où provient la toile de tente, les natifs expliqueront qu'ils l'ont échangée contre de la viande et une carapace de caguama (loggerhead) à un marchand itinérant, Albert Rund.
Les natifs laisseront les personnages regarder la toile de tente, mais ne les laisseront pas entrer à l'intérieur et commenceront à se montrer méfiants si les PJ insistent. Ils seront disposés à l'échanger, par exemple contre une tente du même type (encouragez au besoin les joueurs à procéder à l'échange, en évoquant les indices que pourra éventuellement fournir la tente si elle est examinée de façon approfondie).


Albert Rund

Rund est en quelque sorte un colporteur moderne : arrivé sur Poséidon il y a une douzaine d'années (il en a trente-sept), il gagne confortablement sa vie en circulant en sauterelle entre les villages natifs de l'archipel de Haven : il apporte aux natifs médicaments et équipement moderne, et en échange, ceux-ci lui fournissent des produits tirés de l'écosystème posidonien : nourritures exotiques qu'il revend à des restaurants huppés de Haven, produits naturels utilisés dans la pharmacopée native, artisanat expédié vers la Terre où il s'arrache à des prix indécents, etc...
Rund se souvient très bien de la toile de tente qu'il a échangée à Aignan. Comment aurait-il pu oublier une tente ainsi décorée ? Il l'avait récupérée sur la grève de la pointe nord de l'île de Paris, parmi divers débris probablement issus d'un naufrage. Il ne se souvient pas de la date exacte de sa découverte (qu'il n'a pas jugé utile de signaler aux autorités), mais en y réfléchissant bien et par déduction, il aboutit à une fourchette d'une dizaine de jours, environ un mois après la disparition de Warwick.
Rund ne peut guère fournir d'autres éléments exploitables pour l'enquête des personnages. Les objets échoués sur la plage n'étaient pour la plupart pas récupérables (débris de caisses, etc...), seule la toile de tente présentait à ses yeux un quelconque intérêt. Il n'a pas vu le moindre corps. Il peut indiquer sur une carte de l'île l'endroit approximatif où il l'a trouvée : il s'agit d'une petite crique avec une plage de graviers, où il s'était arrêté pour s'abriter d'un grain.


Paris, cap nord

Les personnages voudront sans doute se rendre sur les lieux où a été retrouvée la tente.
Il n'y a pas grand chose à voir là-bas, d'autant plus que l'endroit exact où Rund a récupéré la toile n'est pas connu.
En suivant la côte, les personnages trouveront plusieurs endroits pouvant correspondre à la description du marchand. Aucun d'entre eux ne porte la moindre trace d'un échouage : la mer et la nature sauvage les ont fait disparaître.

À noter que s'ils examinent la direction des courants, les personnages constatent qu'un échouage sur la pointe nord de Paris est cohérent avec un naufrage dans la zone où a disparu Warwick.


On se fait une toile ?

La toile est l'élément clé pour la suite de l'enquête des personnages. En effet, son étude approfondie peut leur apporter nombre d'indications.

Tout d'abord, les personnages peuvent à juste titre se demander pourquoi la toile n'a pas sombré, alourdie par l'eau qui l'imbibait, mais a flotté jusqu'à la plage. Ceci peut les amener à douter (avec raison) de la thèse du naufrage.

Ensuite, la toile ainsi imbibée d'eau et restée à l'abandon pendant environ un mois aurait en toute logique dû être attaquée par les moisissures galopantes (fast fungus) : or, elle est encore en bon état, et s'ils ont questionné Rund sur ce point, le marchand itinérant leur aura confirmé que la toile était à peine humide et très peu moisie.

Enfin, les personnages peuvent avoir la bonne idée de soumettre la toile de tente à des analyses scientifiques modernes ; par exemple, en étudiant les particules accumulées entre les fibres de bioplastique.
Si les traces de boues diverses, de sel et autres, ne présentent pas un grand intérêt, il n'en va pas de même des pollens qui se retrouvent prisonniers de la trame. Car si certains sont parfaitement banals, d'autres appartiennent à une espèce de carniflore qui n'a jusqu'à présent été décrite que sur une seule île de la planète, Tabor, une petite île de l'archipel de Haven, au nord de Caribou... Et la floraison de cette plante avait lieu à l'époque de la disparition de Warwick. Cela vaut peut-être le coup d'aller y faire un tour.


L'île Tabor

Probablement baptisée ainsi en hommage à Jules Verne, l'île Tabor (ne la cherchez pas sur la carte de l'archipel Pacifique (Pacifica Archipelago), elle est trop petite pour y figurer) est inhabitée.
Prolongée du côté sous le vent par une imposante mangrove posidonienne, Tabor a été visitée par plusieurs expéditions scientifiques, ce qui explique que la flore de sa mangrove soit relativement bien connue. La dernière expédition, organisée par le HIST, remonte néanmoins à huit ans ; à l'époque, Franck Warwick n'était qu'assistant-chercheur à l'Institut, et il n'a pas participé au voyage.

Si les personnages se sont débrouillés d'une manière ou d'une autre pour mettre la main sur les notes du disparu concernant les Aborigènes (dans l'ordinateur de son bureau au HIST, ou sur une aiguille de données (dataspike) à son appartement), ils peuvent en les consultant constater que le nom de l'île Tabor y revient assez souvent : il semble que, parmi la kyrielle de témoignages rassemblés par Warwick, un certain nombre aient pour cadre les alentours de l'île. Tabor n'est pas le seul lieu à présenter cette particularité, mais au vu des éléments fournis par l'examen de la toile, cette information prend une toute autre importance.
D'après ces notes cependant, Franck ne s'est jamais rendu sur place. La présence des pollens sur sa toile de tente est donc inexplicable.

Les rapports des diverses expéditions scientifiques ne fournissent aucune information en rapport avec les Aborigènes, qui n'y sont même pas évoqués. Tous insistent par contre sur la dangerosité de l'écosystème local, en particulier dans la mangrove elle-même ; c'est d'ailleurs en raison de ces dangers que l'île n'a jamais été durablement habitée.

Les personnages vont certainement passer outre et se rendre sur les lieux.

Tabor est une île de petite taille, mesurant moins de deux kilomètres selon son grand axe, pour une largeur qui ne dépasse jamais cinq cents mètres. De forme légèrement arquée, elle est comme nous l'avons vu prolongée dans sa concavité par une immense mangrove. L'île elle-même, dont le point culminant est à une trentaine de mètres au dessus du niveau de la mer, est couverte d'une jungle épaisse et des premières incursions de la mangrove, et la démarcation entre la terre ferme et les sédiments accumulés en bordure de la mangrove elle-même n'est pas toujours facile à déceler.
Enfin, l'île Tabor ne possède aucun cours d'eau.

Le survol de l'île et de sa mangrove ne montre aucune trace de la présence éventuelle d'habitants.
En faisant le tour (en bateau ou en volant au ras des flots), on peut découvrir l'existence au sein de la mangrove de plusieurs chenaux de marée, qui permettent d'accéder assez facilement à l'intérieur de la masse végétale (enfin, assez facilement... il faut y aller avec une petite embarcation genre canot, ou à la nage).


'Grove, baby, 'grove

Si les personnages s'aventurent au c½ur de la mangrove (de préférence pour eux en suivant l'un de ces chenaux), faites leur tout d'abord découvrir quelques particularités de la flore et de la faune locale.
Dans un premier temps, ceci doit plus avoir un aspect touristique, pour faire ressentir aux joueurs l'exotisme de cet écosystème si particulier, qu'être des rencontres de monstres errants. Ainsi par exemple, plutôt que de faire subir aux personnages l'attaque d'une carniflore, décrivez leur le charnier qui entoure un pied de cette plante. Le but est de bien faire ressentir aux joueurs le fait que leurs personnages s'enfoncent dans une nature dangereuse, hostile même, où le moindre faux pas peut leur être fatal, mais aussi une nature merveilleuse et pleine de beauté.

Quand vous estimerez en avoir fait assez dans la couleur locale, les personnages tomberont sur l'épave d'une sauterelle dont on peut se demander comment elle a fait pour arriver aussi profondément dans la mangrove : il s'agit de celle de Warwick, comme en témoignera la plaque d'immatriculation une fois qu'elle aura été dégagée.

En fait d'épave, le véhicule, bien que fortement cabossé, n'est ni échoué, ni accidenté ; il est simplement posé à la surface de l'eau, dans un chenal de marée, amarré à un tronc proche. Mais il est visiblement laissé à l'abandon, et la végétation commence à le recouvrir, s'insinuant même par une portière mal fermée.
L'intérieur de la sauterelle est en désordre, un désordre auquel ne sont pas étrangers la végétation et les moisissures qui l'ont fortement envahie, et sans doute les singes-branchages (stick monkeys) dont on entend les cris discordants dans la canopée de la mangrove. Visiblement, l'intérieur de l'habitacle a été utilisé comme lieu de campement, mais il y a un certain temps que Warwick a abandonné l'appareil.
En raison des dégâts causés par l'humidité et par les moisissures, les personnages ne pourront pas récupérer grand chose d'intéressant parmi le matériel abandonné dans la sauterelle. S'ils ont perdu une pièce cruciale de leur équipement et si vous vous sentez d'humeur généreuse, vous pouvez éventuellement leur permettre d'en trouver l'équivalent, dans un état probablement peu ragoûtant.
Par contre, s'ils fouillent attentivement le contenu de la sauterelle, ils se rendront compte que deux caisses vides et désormais couvertes de moisissures contenaient à l'origine du matériel de plongée.
Quant au matériel informatique, il est tellement endommagé par les conditions qui règnent dans l'épave que la récupération des données qu'il contient ne peut s'envisager sans le passage par un labo propre et sec, et reste quoi qu'il en soit incertaine.
Il est à noter que le réservoir de la sauterelle est presque vide et que son contenu ne permettrait pas de gagner l'île habitée la plus proche.

Arrivés à ce stade de leur enquête, les personnages ont retrouvé la trace de leur ami ; mais où ce dernier a t-il bien pu passer ?
Les caisses vides donnent une piste : Warwick (qui n'était pas génétiquement modifié pour la plongée) est allé SOUS la mangrove.


Le grand bleu

Si les personnages plongent à leur tour sous la mangrove, commencez par leur décrire le véritable labyrinthe constitué par les racines de la colonie végétale, forêt immergée de piliers sombres dont les lumières de leurs torches percent à grand peine la noirceur.
Car n'oubliez pas qu'il fait particulièrement sombre là-dessous, encore plus que dans la mangrove elle-même. Et profitez en pour jouer avec les peurs de vos joueurs : un contact visqueux peut être une feuille morte tombée dans l'eau, ou le tentacule d'un prédateur dissimulé dans l'obscurité.
Toutefois, le but de cette plongée n'est pas d'amocher les personnages, et à moins que vos joueurs ne soient en manque de combats, évitez de leur faire rencontrer des prédateurs dangereux... ou tout au moins, des prédateurs se montrant dangereux à leur passage.
La mangrove est fermement enracinée sur le fond marin, à une bonne vingtaine de mètres de profondeur.

Laissez les personnages barboter aussi longtemps qu'ils le voudront, profitez en éventuellement pour continuer la leçon de choses commencée dans la mangrove ; de toutes façons, ils ne trouveront rien de concret pour leur enquête.
Si vous en avez marre, mais qu'ils ne semblent pas manifester de velléités particulières de retourner à la surface, indiquez leur nonchalamment qu'ils se trouvent sous un chenal dont la largeur permet probablement l'accès aux "petits blancs" (lesser whites), qu'il leur semble justement qu'une forme assez imposante progresse dans leur direction en venant du large, et que plusieurs bancs de petits poissons viennent de filer rapidement autour d'eux...


La jungle en folie

Lorsque les plongeurs remontent à la surface, ils ne sont pas plus avancés qu'avant : Warwick a bel et bien disparu, et il est probable qu'il ait été victime de la faune (ou de la flore), que ce soit au dessus ou en dessous de la surface de l'eau. L'enquête semble devoir s'arrêter là...

Les personnages peuvent choisir de quitter immédiatement les lieux, essayer d'y poursuivre un peu plus leurs recherches, ou s'organiser pour bivouaquer dans la mangrove. Quoi qu'il en soit, ils vont très vite avoir l'impression qu'une créature les observe. Il s'agit de Warwick (ou plus exactement, de ce qu'il est devenu ; voir Que s'est il donc passé exactement ?), mais ils n'en savent rien.
Dans cette partie du scénario, il vous faut exploiter au mieux les "fantasmes" issus de l'imagination de vos joueurs. En particulier, s'ils connaissent le film Predator, vous disposez d'un véritable boulevard pour les amener à stresser un maximum.
Décrivez leur une forme vaguement humanoïde, de couleur verdâtre se confondant avec celle de la végétation environnante, qu'ils entrevoient parfois du coin de l'½il, mais qui a disparu dès qu'ils essaient de mieux la voir.
Jouez aussi sur les bruits de la mangrove... ou leur soudaine absence.
Bref, amusez vous avec les nerfs de vos joueurs...

Bien entendu, ils finiront sans doute tôt ou tard par craquer. Mais la créature qui fut Warwick n'a rien du predator du film : il ne s'agit en fait que d'un humain, légèrement modifié par les nanotechnologies des Créateurs, complètement dément, qui vit dans la mangrove comme une sorte de singe nageur, se nourrissant de plantes et de petits animaux, et qui surveille à distance les personnages qui sont entrés sur son territoire.
Le nouveau Warwick est méconnaissable : hirsute, barbu, aux ongles noirs et longs, à la fois bouffi (conséquence des manipulations des Aborigènes) et efflanqué (à cause de son régime alimentaire), verdâtre (en raison des algues et moisissures qui poussent dans ses poils et sur sa peau, conséquence entre autres de ses fréquents bains dans les eaux de la mangrove), il ressemble un peu aux créatures du marais dans Les eaux de colère, le huitième tome de la série BD Jeremiah.
Malgré son apparence inquiétante, il est (relativement) inoffensif, et n'attaquera les personnages que pour se défendre, si ceux-ci l'acculent (ou tout au moins, s'il se sent acculé ou pris au piège). Gageons toutefois que nos héros risquent plutôt de se sentir menacés, et de l'abattre comme une bête nuisible...
Dans tous les cas, pour reconnaître Warwick sous l'aspect de cette créature, il faudra l'examiner de près, sans doute après l'avoir débarbouillé et rasé. Ses traits ont été déformés par les nanites, mais on peut encore l'identifier visuellement. Par contre, un test génétique révèlera de profondes modifications au sein de son ADN, inexplicables en l'état actuel des connaissances scientifiques.

Si les personnages parviennent à le capturer sans le tuer, ils pourront ramener Warwick à Haven, mais il leur faudra le maintenir attaché ou enfermé comme un animal sauvage.
Les connaissances scientifiques, médicales et psychiatriques s'avèreront insuffisantes pour le ramener à un état "normal", et il se laissera mourir de faim (après avoir été longtemps nourri par perfusions), "en captivité" dans l'aile psychiatrique du centre médical de Haven (First Colony pp 47/48). Après sa mort, les médecins l'autopsieront de façon très poussée, et on fera même des coupes ultramicrotomiques de plusieurs de ses organes.
Chercheur médiocre de son vivant, Warwick fera l'objet de multiples publications scientifiques après sa mort... Piètre consolation, pour celui qui était finalement un vrai spécialiste des Aborigènes...

Quant à ces derniers, les personnages ne les verront bien entendu à aucun moment du scénario.


Que s'est il donc passé exactement ?

Le HIST n'appréciait pas que Warwick dépense tout son temps, son énergie, et surtout les crédits qui lui étaient alloués, à poursuivre ses idées farfelues sur les Aborigènes. Apprenant qu'on allait cesser de financer ses recherches, ou le forcer à retourner à des sujets plus "concrets", Warwick, qui avait déjà été quitté par sa compagne (elle aussi lasse de son obsession pour le mythe des Aborigènes) quelques mois plus tôt, a certes pensé au suicide.
Et puis il a cherché l'oubli dans le travail, ou plutôt dans son obsession, et en recoupant une nouvelle fois des éléments qu'il avait rassemblés au sujet des Aborigènes, il en a conclu que certains de ces derniers vivaient à proximité étroite de l'île Tabor.
Profitant d'un voyage qu'il devait faire dans le cadre universitaire, il a décidé de se rendre à cette île, située à environ 150 km de son itinéraire. Pour ne pas être repéré (et rappelé à l'ordre par sa hiérarchie), il est brusquement descendu au ras des vagues après avoir quitté l'île de Paris, et a poursuivi son voyage à très basse altitude.
À ce moment là, Warwick n'avait pour intention que de passer quelques temps sur place pour étudier les lieux et si possible les Aborigènes ; mais après avoir passé quelques semaines sur l'île Tabor, persuadé de la présence en ce lieu des objets de son obsession, et désireux de poursuivre sa vie en leur compagnie, puisque les humains s'avéraient incapables de le comprendre et ne voulaient plus de lui (il faut dire que sa fixation sur le sujet de ses recherches l'avait passablement névrosé), il péta les plombs et décida de mettre en scène son propre naufrage, en revenant semer quelques objets sur le littoral nord de l'île de Paris (et profitant de l'occasion pour se débarrasser de sa tente, qui lui rappelait trop Anne, son ex compagne... mais qui, ironie du sort, sera l'objet qui remettra les personnages sur ses traces). De retour à Tabor, il installa son campement dans sa sauterelle, ce qui lui permettait à la fois d'être au sec, à l'abri des prédateurs, et mobile. Plusieurs plongées le convainquirent que pour trouver les Aborigènes, il lui fallait pénétrer au c½ur de la mangrove ; ce qu'il fit, pilotant en force sa sauterelle le long d'un chenal de marée.
En plongeant sous la mangrove, Warwick découvrit l'existence d'une fissure au fond de l'océan. Pénétrant dans cette fissure, il réussit à accéder à l'intérieur d'une cache des Créateurs. Ou plus exactement, il arriva sur le seuil d'une cache des Créateurs, et les Aborigènes décidèrent de le laisser entrer.
De le laisser entrer pour étudier de plus près un spécimen humain. Et de fil en aiguille et de test en expérience, les Aborigènes et leur nanotechnologie modifièrent en profondeur (au niveau génétique) le pauvre Warwick, complètement allumé et qui ne se rendait plus compte de rien depuis qu'il avait pénétré dans la cache.
En fait, les Aborigènes avaient commencé par influer sur le comportement de leur victime en diffusant diverses substances psychoactives dans l'eau autour de l'entrée de la cache ; ces substances contribuèrent à faire perdre la raison au malheureux Franck. D'autres substances furent alors utilisées pour l'attirer dans la fissure, où il fut capturé. Après l'avoir examiné en profondeur et pratiqué sur lui plusieurs expériences, les Aborigènes relâchèrent Warwick ; ou du moins, ce qu'il était devenu : il ressemblait désormais à une version bouffie de l'homme que connaissaient les personnages.
La créature qui fut Warwick était désormais un animal de la mangrove parmi les autres.


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