La malédiction des Diy-Gid-Biy


Ébauche de scénario archéologique, où une idole exhumée lors de fouilles laisse derrière elle une traînée de cadavres, réalisée à l'origine pour le dix-septième concours de scénarios de la Cour d'Obéron, et présentée ici dans une version mise à jour.
Le thème du concours était la vengeance d'une / des idole(s), et l'élément imposé, perte(s) de mémoire(s) (l'élément imposé, rajouté quelque peu artificiellement dans la version initiale, a été supprimé ici).


Ce scénario est tout spécialement dédié à Cécile, qui m'a exhumé la piste archéologique, et à Jean-Loup, qui a déterré le site.

L'époque exacte à laquelle se déroule le scénario n'est pas précisée ; elle peut être située dans les années vingt ou trente, ou éventuellement entre 1945 et 1959 (à la fin de cette période, le Cameroun est quelque peu agité par une guérilla indépendantiste, dont les actions se déroulent pour l'essentiel loin des lieux du scénario).
Les PJ font partie d'une expédition archéologique française dans le nord du Cameroun, partie fouiller les ruines de Kuva, l'un des sites du mont Mandara connus sous le nom de Diy-Gid-Biy, qui dans la réalité n'a pas subi de fouille sérieuse à l'époque.
Ils peuvent être les chefs de l'expédition ou de simples "sous-fifres", mais chacun d'eux doit avoir un bon motif pour revenir en métropole après les fouilles, et si possible continuer à graviter autour des objets ramenés : archéologues, étudiants accompagnant un professeur (sous le prétexte de leur thèse, mais en fait pour faire le sale boulot d'investigations archéologiques dont seul l'enseignant récoltera les lauriers), etc...
La présence d'un PJ possédant de solides connaissances médicales (médecin, professeur de médecine tropicale, etc...) serait un plus.

Ce scénario se veut utilisable avec tout JDR ayant pour cadre la période où il se déroule ; mais il sera probablement plus difficile à résoudre à Call of Cthulhu, car les joueurs et leurs personnages devront adopter un mode de pensée plutôt inhabituel à ce jeu, qu'avec un JDR plus prosaïque.

Si vous êtes censés participer à ce scénario en tant que joueurs, ne lisez pas plus loin...


Ô Cameroun, berceau de nos ancêtres

Venus de métropole, les PJ débarquent en fin d'été au port de Douala, la principale ville camerounaise de l'époque, d'où partira l'expédition.
Après avoir recruté du personnel indigène ou expatrié (guides, etc...) et s'être correctement équipée et approvisionnée, l'expédition part en camions pour le mont Mandara, à l'extrême nord du pays.
Le trajet est l'occasion pour le MJ de donner du corps à la "caravane" et à ses multiples PNJ, européens et indigènes, et de permettre aux joueurs qui le désirent d'interagir avec eux. Il sera également possible de jouer des scènes de type safari si cela correspond aux attentes de certains joueurs.
Une fois sur le site des fouilles, l'expédition installe son campement, recrute de la main d'œuvre parmi les Mafa des villages alentour (il faut des bras solides pour manier pelles, pioches et brouettes !), et après une cérémonie (qualifiée de superstition par les PNJ archéologues, qui cachent à peine leur mépris pour ce genre de pratiques) pour se concilier les bonnes grâces des esprits du site, les excavations peuvent commencer.


Les arcanes exhumées

La fonction des Diy-Gid-Biy n'est toujours pas connue avec certitude à notre époque. L'expédition des PJ, persuadée qu'il s'agit des vestiges d'une forteresse ou d'une nécropole, ne sera pas plus performante : ainsi, après avoir trouvé dans une chambre (non comblée par de la terre et d'où l'irruption des ouvriers fera fuir une nuée de petites chauves-souris, qui y pénétraient d'ordinaire par les interstices entre les pierres du mur et dont les déjections souillent en abondance le sol) des fragments de poterie associés à de petits ossements d'animaux, les spécialistes conclueront à la découverte d'une idole animiste en terre cuite dont ils s'efforceront avec patience de reconstituer la forme animalière.


L'idole se venge

Peu après la découverte de "l'idole", alors que les archéologues viennent tout juste d'en recoller les morceaux (à l'instant même où ils le clament, ou à tout autre moment dramatiquement approprié) le PNJ qui a pris la part la plus active dans l'excavation de la chambre où elle se trouvait fait une chute mortelle du haut d'un des murs de pierre du Diy-Gid-Biy. Un autre des ouvriers ayant participé meurt écrasé lorsqu'un autre mur, instable et fragilisé par les fouilles, s'écroule sur lui. Il s'agit d'accidents, mais il n'en faut pas plus pour semer la consternation parmi les terrassiers et lancer la rumeur d'une malédiction de l'idole sur ceux qui ont profané son sanctuaire, rumeur bien alimentée par une légende ressortie fort à propos par un vieil habitant du coin, parlant d'un lieu sacré situé dans les ruines de Kuva et dont la profanation doit déchaîner le courroux des esprits.
Face au mécontentement grandissant parmi les Mafa et à la désertion soudaine d'une partie des ouvriers, les archéologues décident qu'ils ont récolté suffisamment d'informations et d'objets, et choisissent de cesser les fouilles avant d'être lynchés. Les pièces découvertes sont emballées avec soin, une nouvelle cérémonie a lieu pour apaiser les esprits du lieu, et l'expédition reprend la route de Douala (si le MJ a su gérer l'écoulement du temps, ce retour a lieu en octobre).

Sur le chemin du retour, vous pouvez mettre en scène un ou deux autres accidents mortels (un conducteur qui perd le contrôle de son engin et dégringole dans un ravin, par exemple, ou si vous aimez les animaux, une envenimation par serpent ou scorpion), mais n'en abusez pas.
Un ou plusieurs PJ pourrai(en)t échapper de peu à la mort. Évitez cependant de les tuer, il est encore trop tôt !


L'idole vient en France

À Douala, les membres de l'expédition retournant en métropole embarquent à bord d'un paquebot (à destination de Marseille, Bordeaux ou Le Havre), accompagnés de leurs précieuses trouvailles, dont l'idole.
Il n'est pas impossible qu'un PNJ, peut-être ivre, passe par dessus bord et se noie ; dramatique accident que des esprits impressionnables associeront peut-être aux précédents pour continuer à parler d'une vengeance de l'idole...


L'idole se déchaîne

Une fois de retour en France, vous pouvez continuer à causer quelques victimes dans les rangs des PNJ ayant participé à l'expédition, au moyen d'accidents variés (piéton renversé par une voiture, par exemple).
Mais un danger d'une nature différente attend les survivants, y compris sans doute certains des PJ : s'il n'y a bien entendu aucune malédiction de l'idole (ce qu'en bon cartésien, le lecteur aura compris depuis longtemps), elle présente un danger bien plus prosaïque : la chambre dans laquelle elle a été découverte était infestée de spores d'un champignon fortement pathogène pour l'homme, et les individus ayant pénétré dans la chambre ou ayant été en contact avec la poterie vont être victimes d'une anadémie gravissime.

La maladie touchera en priorité les gens ayant abondamment respiré l'atmosphère confinée de la chambre de l'idole, ou beaucoup manipulé l'idole elle-même : celui qui l'a reconstituée minutieusement, morceau par morceau, sera l'un des tous premiers à en exprimer les symptômes.
Ensuite, les personnes qui tomberont malades seront celles dont l'organisme est moins résistant : personnes âgées (vieux professeur proche de la retraite) par exemple. Les derniers affectés seront les individus en pleine forme physique (jeunes adultes athlétiques). Les individus n'ayant ni pénétré dans la chambre, ni manipulé la poterie, ni côtoyé de près les malades ou futurs malades, seront épargnés.

L'agent en cause est donc un champignon microscopique encore inconnu, levure appartenant au genre Histoplasma et qui pourrait une fois isolée être baptisée du nom du PJ découvreur éventuel. La contamination se fait par inhalation des spores (conidies). Les symptômes sont tout d'abord respiratoires (évoquant la tuberculose : gêne respiratoire, toux parfois sanguinolente), accompagnés de fièvre et d'asthénie, puis l'infestation gagne l'ensemble de l'organisme et finit par être fatale en l'absence de traitement. Et à l'époque, l'arsenal thérapeutique n'était pas aussi bien pourvu que de nos jours !

Si vous avez situé l'action à la fin des années cinquante, les PJ ont plus de chances de s'en tirer : l'amphotéricine B, administrable par voie intraveineuse, a été découverte en 1955. Sinon...

Dans les deux premiers cas, la survie des malades dépendra de la rapidité avec laquelle la piste surnaturelle d'une malédiction sera éliminée, au profit d'une plus prosaïque cause médicale (qui n'expliquera bien entendu pas les quelques morts accidentelles, dues à de simples coïncidences mais qui auront sans doute frappé les esprits et excité les imaginations).
Une analyse rationnelle de la situation montrera qu'il n'y a pas a priori de rapport entre les premiers décès, alors que les victimes plus récentes ont succombé à une même maladie, présumée par les médecins être la tuberculose. Devant l'inefficacité des traitements prescrits, il faut suspecter une autre cause. L'examen approfondi des malades ou l'autopsie des victimes permettra de réaliser des prélèvements qui, examinés au microscope, montreront la présence de levures inconnues et permettront de mettre en œuvre des traitements antifongiques.
Si les PJ pataugent, les levures pourront être mises en évidence à l'occasion d'une recherche (infructueuse) de bacille tuberculeux dans les crachats des malades.
Quant au recoupement des données concernant les malades, il mettra en évidence que tous ont, soit pénétré dans la chambre de l'idole, soit manipulé la poterie, soit fréquenté étroitement quelqu'un qui l'a fait (les conjoints et enfants des archéologues, en particulier, risquent de payer un tribut à la maladie).

Bref, la réussite du scénario repose sur l'adoption suffisamment précoce par les PJ d'une démarche rationnelle pour identifier et stopper la prétendue malédiction, et en particulier éviter la propagation de la maladie dans l'entourage des malades... et de l'idole elle-même.


Épilogue

Suite à la découverte de cas chez des personnes ayant manipulé l'idole en France (pour la ranger dans la collection d'un musée, par exemple), il sera décidé d'incinérer l'objet, au grand dam de la communauté scientifique qui perdra là une pièce des plus intéressante.


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