La campagne


Cette section présente des informations concernant plus particulièrement la campagne Space 1890 que je maîtrise actuellement.

Attention ! Certains passages de la campagne étant adaptés de scénarios publiés, la lecture des résumés pourrait gâcher le plaisir de la découverte à ceux qui auraient ultérieurement l'occasion de jouer ces mêmes scénarios.


Les personnages

Les données techniques concernant ces personnages font référence aux règles de GURPS mais intègrent un certain nombre de modifications à ces règles, en usage dans mes campagnes.

Louis Andrieux : grand reporter à l'Intersidéral Géographique
Aldémar Durieux : commandant de l'infanterie de marine à la retraite et chevalier de la Légion d'Honneur
Humbertus Léontieff : professeur de planétologie comparée et de cosmographie à l'Institut Catholique de Paris et savant de très haut niveau
Henri Porteur : explorateur et aventurier

Questionnaire à remplir pour chaque PJ : ce questionnaire devait être rempli pour chacun des PJ avant le début de la campagne, afin de permettre au MJ (et aux joueurs !) de mieux les cerner.


La situation de départ

Nous sommes le mercredi 29 janvier 1890 en fin d'après-midi. Les personnages mettent la dernière main aux préparatifs de leur expédition scientifique sur la planète rouge, sous l'égide de la Société Géographique des Gens de Bien (rue de Vaugirard, Paris 6ème), dont l'un des membres, le commandant Durieux, est l'un des principaux bailleurs de fonds de l'opération.
Dirigée par le jeune professeur Léontieff, elle aura pour but principal de lui apporter des éléments supplémentaires en faveur de sa théorie unifiée de paléophysique planétaire. Mais elle sera loin de se limiter à cet aspect des choses, comme en témoigne la présence dans ses rangs des professeurs André Montazet (titulaire de la chaire de sciences naturelles à la Sorbonne) et Auguste Leduc (professeur d'histoire à l'École Normale Supérieure et grand spécialiste de l'archéologie). Et puis, les secrets que recèle la planète rouge ne sauraient en aucun cas se limiter aux spécialités de ces trois universitaires, aussi attend on de l'expédition une moisson de nouvelles connaissances. Et le gouvernement français lui-même entend bien que le pays tout entier en retire de la gloire, et surtout montre bien aux Anglais que sur Mars, il leur faut compter avec les Français.
Outre les trois professeurs et Victor Jambart, l'assistant du professeur Léontieff, l'expédition compte en ses rangs le commandant Aldémar Durieux, le journaliste Louis Andrieux, dont la réputation de grand reporter n'est plus à faire, et l'explorateur Henri Porteur, dont la connaissance de Mars sera un précieux atout.
L'embarquement pour la planète rouge est prévu pour le vendredi 31. L'expédition voyagera à bord du nouveau transéthérique tout juste sorti des ateliers de construction aéronavale de Honfleur, le Ville de Syrte, dont ce sera par ailleurs le premier voyage éthérique.


Les mystères de Paris

Ce premier scénario est basé sur le début de Canal Priests of Mars.

Alors qu'ils se trouvent à la Société Géographique des Gens de Bien pour discuter des derniers préparatifs de leur expédition, les membres de l'expédition (à l'exception de Louis Andrieux, absent) sont contactés par maître Gustave Tournier, un notaire qui souhaite les mettre en relations avec deux de ses clients, personnalités religieuses qui doivent eux aussi se rendre à Syrte à bord du Ville de Syrte, et qui, transportant une œuvre d'art antique d'une valeur inestimable, préfèreraient faire le trajet en compagnie de gentilshommes dignes de confiance, plutôt que seuls, car ils craignent les tentatives de vol.
Contrairement aux attentes des personnages, les religieux en question ne sont pas des prélats du Vatican, mais deux Martiens des canaux, Sneel Asnuun, grand-prêtre du temple de Gaaryan, et Volaace Zeenkeer, son secrétaire-initié.
Lorsque les premiers Terriens sont arrivés sur Mars, la religion des canaux était en déclin, elle ne progressait plus sur le chemin de l'illumination par les bonnes œuvres et l'opposition au maléfique culte du Ver. Les prêtres du grand temple de Gaaryan, s'étant réunis en conclave, avaient compris qu'une étincelle vitale de sainteté avait dû s'échapper de leur temple. Quand ils apprirent l'arrivée des Terriens, ils comprirent aussi que le pur pouvoir de la foi qui peut creuser des canaux était désormais parti pour la Terre. Pendant des années, les prêtres discutèrent de la situation, pour finalement conclure que la seule façon de restaurer la bonté en toutes choses était d'emmener leur relique la plus sacrée sur Terre et de la recharger à la source de la puissance terrienne, d'où coule selon eux la force spirituelle : Notre-Dame de Paris.
Les deux gardiens des canaux sont donc à Paris pour une tâche de la plus haute importance : faire bénir à Notre-Dame l'amulette de Haldon.

Les deux prêtres étaient à l'origine escortés par plusieurs gardes, mais ceux-ci ont été empoisonnés pendant le voyage éthérique. Craignant pour leur sécurité et plus encore pour l'amulette, et ne sachant à qui s'adresser pour obtenir de l'aide, les deux Martiens, qui soupçonnent des manigances du culte du Ver, se sont tournés vers l'expédition du professeur Léontieff, dont la presse a abondamment parlé ces derniers temps.

Les personnages acceptent de les escorter dès à présent et jusqu'à Mars ; en échange, les Martiens paieront le voyage vers la planète rouge pour toute l'expédition, bagages compris.

Raccompagnant en fiacre les deux Martiens de l'étude de maître Tournier vers leur hôtel, les personnages remarquent qu'un autre fiacre semble les suivre. Sur le boulevard Saint-Germain, le véhicule accélère brusquement et se porte à la hauteur de leur voiture. Pendant que le cocher assène un coup de fouet à son confrère (qui perd le contrôle de son attelage), l'un des occupants du fiacre mystérieux jette violemment dans l'habitacle des personnages une grenade à la mèche allumée, mais Henri Porteur parvient à la jeter au loin avant qu'elle n'explose.
Au prix de quelques contorsions, Aldémar Durieux se hisse sur le siège du cocher, et parvient (avec l'aide d'Humbertus Léontieff et de sa dextérité dans le maniement de la canne) à repousser le cocher assaillant qui tente de prendre les rênes.
Ouvrant la portière, Henri réussit à détourner le canon d'un fusil pointant du véhicule adverse, envoyant le tir se perdre dans les airs.
Alors qu'Aldémar a repris le contrôle de l'attelage, le cocher assaillant, cramponné au côté du fiacre, finit par lâcher prise et tombe sur la chaussée. Henri lui saute dessus, le maîtrise et tente de l'embarquer de force, mais comme l'individu mystérieux se débat, Humbertus arrivé en renfort l'assomme du pommeau de sa canne. Les deux hommes embarquent leur victime, et Aldémar fait foncer ses chevaux, pour tenter d'échapper à l'autre voiture qui s'est lancée à leur poursuite.
Arrivant sur le boulevard Saint-Michel, Aldémar ralentit pour permettre au cocher, toujours sous le choc du coup de fouet en plein visage qu'il a reçu, de descendre, tandis que Henri éjecte son prisonnier toujours inconscient après l'avoir fouillé. Aldémar repart de plus belle, et les poursuivants s'arrêtent pour secourir leur camarade. Arrivant à la Seine, hors de vue des assaillants, Henri descend de voiture et court vers l'endroit où leur fiacre s'était arrêté. Croisant ledit fiacre, il se dissimule sous une porte cochère, puis parvient à bondir et à se cramponner à l'arrière du véhicule. Celui-ci se dirige droit à l'ambassade de Prusse, 78, rue de Lille. Henri descend discrètement pendant que la voiture est arrêtée devant le portail et, n'osant pas s'introduire dans l'enceinte de l'ambassade, rejoint les autres rue d'Assas, à l'appartement d'Humbertus, où se trouve aussi Louis Andrieux.

Pendant qu'Aldémar part recruter quelques "gros bras" parmi ses anciens subordonnés résidant dans la capitale, Henri, Louis et Victor Jambart accompagnent Volaace Zeenkeer à son hôtel pour récupérer les bagages des Martiens : il a été décidé que les deux religieux passeraient la nuit chez Humbertus, pour plus de sécurité. Sneel Asnuun reste donc seul avec le professeur Léontieff dans l'appartement de ce dernier.
Dans la chambre louée par les Martiens, Louis a la surprise de tomber nez-à-nez avec un ts'kkiss, un reptile martien dont la morsure est redoutablement venimeuse, et potentiellement mortelle.

Croyant qu'il s'agit d'un animal familier appartenant aux deux prêtres, le reporter ne se méfie pas (du reste, il ignore la nature exacte de l'animal), et la bête bondit sur lui. S'ensuit une courte lutte, à l'issue de laquelle Henri et Louis, avec l'aide de Victor Jambart, parviennent à enfermer l'animal dans une valise vide.

Resté seul avec Sneel Asnuun, Humbertus tente d'engager la conversation avec le Martien, mais celui-ci ne parlant pas français, l'échange reste relativement limité.
Ayant entendu du bruit dans son bureau, il a la surprise d'y découvrir un haut Martien, vêtu à l'européenne d'un pantalon et d'une lourde veste, en train de fouiller dans ses affaires. L'intrus semblant menaçant et ses crocs pouvant représenter un danger bien réel, Humbertus se saisit d'un coupe-papier et s'avance dans la pièce. Le visiteur indésirable tente de le maintenir à distance en tournant autour du bureau et en lui jetant de lourds volumes scientifiques à la figure, puis sort des pans de sa veste un poignard à la lame torsadée : un nasha'ïr. Humbertus esquive le premier coup de l'arme et, utilisant la corbeille à papier en cuivre à la fois comme bouclier et comme arme, parvient à faire reculer son agresseur. Le professeur, se trouvant alors près de la cheminée, jette la corbeille à papier au visage de son adversaire, s'empare du tisonnier et, après avoir affermi sa prise sur l'objet au moyen d'un bref moulinet, s'en sert comme d'une canne d'escrime. Surpris devant une telle résistance, le haut Martien commence à avoir le dessous. Profitant d'un bref relâchement de l'attention d'Humbertus au moment où Aldémar, enfin de retour, surgit dans la pièce le revolver à la main, l'intrus bondit par la fenêtre, et s'écrase quatre étages plus bas sur le pavé sous les yeux du reste de l'équipe qui venait d'arriver devant l'immeuble et ne peut que constater le décès. Le corps porte autour du cou un médaillon qu'Henri identifie comme étant l'un des symboles du culte du Ver.

Pendant qu'Humbertus remonte dans ses pénates tenir compagnie aux Martiens avec Aldémar, Louis et Henri hèlent un fiacre, chargent le Martien en le faisant passer pour un homme ivre mort, et se font déposer dans la rue qui passe derrière l'ambassade de Prusse, où ils abandonnent le corps, avant de retourner rue d'Assas.

Il est onze heures du soir, et tandis que les autres vont se coucher, Humbertus se rend à l'Institut Catholique, accompagné de son assistant, afin d'y déposer avec précautions le ts'kkiss dans une solide cage de fer de son laboratoire. Pendant que le savant s'extasie devant l'animal et commence à l'examiner, son assistant finit par s'endormir sur une chaise dans un coin. Ce n'est que quand le feu s'est éteint depuis déjà quelques temps dans le poêle de la pièce qu'Humbertus baille, regarde l'heure tardive (ou plutôt, très matinale !) avec étonnement, réveille Victor Jambart, et regagne ses pénates à pied dans la froidure pour prendre quelques heures de sommeil réparateur.

Au matin du jeudi 30 janvier 1890, ayant fini leur nuit sans encombre, les personnages se retrouvent au Cheval Vert, un café situé non loin de chez Humbertus, pour mettre au point leur plan, car les Martiens souhaitent procéder à la bénédiction aujourd'hui. Sont également présents Alexandre Noirot et Etienne Rohmer, deux anciens sous-officiers ayant servi en Afrique sous les ordres d'Aldémar.
Henri se rend seul à Notre-Dame pour repérer les lieux, et le reste de l'équipe retourne chez Humbertus, avant d'embarquer dans un fiacre avec les deux Martiens en grande tenue de cérémonie.
Une fois dans la cathédrale, le groupe est pris à partie par un prêtre, et de la discussion qui s'ensuit, il s'avère que le clergé local n'était absolument pas au courant de la cérémonie... et refuse catégoriquement de se livrer à un tel rite blasphématoire ! En outre, l'entrée de deux religieux païens en grande tenue dans Notre-Dame n'a probablement rien fait pour arrondir les angles sur un plan diplomatique... Humbertus, Aldémar et Louis parviennent à expliquer qu'il ne s'agit pas d'une cérémonie païenne, que les Martiens viennent se placer sous la protection de l'Église, que leur accoutrement quelque peu inhabituel en ces lieux n'est dû qu'à la différence de coutumes entre eux et nous, et qu'en se vêtant ainsi de leurs plus beaux atours, ils pensaient faire honneur à l'Église. Finalement, l'un des prêtres accepte de réaliser la bénédiction... mais à une condition : les Martiens doivent abjurer leurs croyances païennes, se convertir sur le champ au catholicisme et recevoir le baptême.
L'acceptation de ces conditions par deux hauts responsables d'un culte plusieurs fois millénaire paraissant des plus improbables, le groupe quitte donc la cathédrale pour aller discuter de la situation au calme (d'autant plus que les explications nécessitent de recourir à un vocabulaire théologique relativement pointu, dont Volaace Zeenkeer ne semble pas comprendre les termes français).

Farfouillant dans les poches de son manteau, et après avoir mis la main sur plusieurs mouchoirs, des morceaux de craie de diverses couleurs, quelques échantillons minéraux, une dent fossilisée ayant appartenu probablement à un petit Mammifère, les pages 1 et 3 du brouillon d'un article de physique qu'il a publié il y a deux ans et la fin du texte de sa dernière conférence de planétologie, Humbertus retrouve la carte de visite de maître Tournier, à peine cornée dans les coins, et tous décident de rentrer rue d'Assas pour appeler le notaire et lui exposer la situation. Tournier annonce qu'il va tenter de faire jouer quelques relations, mais il parait peu optimiste quant à ses capacités à faire évoluer les choses.
Les personnages décident de chercher un prêtre catholique prêt à bénir l'amulette dans la cathédrale. Humbertus, enseignant à l'Institut Catholique, estime pouvoir peut-être y trouver des gens qui seraient susceptibles de leur donner un coup de pouce... même s'il est aussi à craindre qu'en cumulant ses origines juives et cette histoire de relique païenne, il trouve aussi des culs-bénits qui se feront un plaisir de lui mettre des bâtons dans les roues.
Ayant demandé aux Martiens en quoi devait précisément consister la cérémonie de bénédiction, les personnages obtiennent de Volaace Zeenkeer la réponse suivante : "Il faut que l'énergie spirituelle du saint lieu sacré descende sur l'amulette pour la remplir telle la foudre sur le < terme martien incompréhensible >, grâce à la foi impeccable du pieux hiérarque invoquant." Devant cette explication, Humbertus décide d'ajouter à la cérémonie un artifice pyrotechnique de son cru.
Sollicité au téléphone par Humbertus, le directeur de l'Institut Catholique ne se montre pas d'un grand secours. Il place même dans la courte conversation une petite réflexion acerbe sur les coutumes païennes et les non catholiques, que son interlocuteur, tout emporté par son enthousiasme et sa volonté de résoudre l'affaire, ne remarque pas, mais qui pouvait fort bien s'appliquer à lui.
Humbertus passe en revue les autres possibilités qui s'offrent à lui parmi ses relations à l'Institut Catholique : il a d'excellentes relations avec le professeur de Lapparent, avec lequel il coopère souvent dans le cadre de l'élaboration de son grand œuvre, sa théorie unifiée de paléophysique planétaire ; mais il est polytechnicien et ingénieur des mines de formation, pas ecclésiastique. Il a aussi de fréquents contacts avec le professeur Branly, qui comme lui est relativement "pluridisciplinaire" ; mais il est normalien, pas ecclésiastique... Toutefois, ces deux professeurs, d'âge mûr et très bien considérés, seraient peut-être en mesure d'obtenir ce que lui n'a pas réussi.
Il y a encore le professeur Loisy. Lui est ecclésiastique, et Humbertus a d'assez bonnes relations avec lui : ils n'ont que quelques années d'écart, et sa connaissance de l'hébreu s'accompagne d'un certain intérêt pour la culture juive ; enfin, il est relativement ouvert par rapport au reste du corps ecclésiastique de l'Institut (ce qui, à la réflexion, pourrait bien finir par nuire à sa carrière).
Laissant les deux Martiens en compagnie d'Aldémar et de ses gros bras, Humbertus, Henri, Louis et Victor Jambart se rendent donc à l'Institut Catholique.

Regrettant l'attitude du clergé de Notre-Dame, Loisy se montre ouvert et parfaitement disposé à procéder lui-même à la bénédiction, pour laquelle il propose spontanément ses services. Il se montre tout aussi désireux de rencontrer les religieux martiens, afin de pouvoir échanger avec eux. Malheureusement, son emploi du temps est des plus chargés.
Finalement, une solution est trouvée : Loisy, se déclare disposé à officier vers cinq heures du soir.
Humbertus ayant remis sur le tapis son idée d'effets pyrotechniques, Loisy tique : "Êtes vous certain que la puissance de l'Esprit Saint, quoique généralement invisible, ne suffira pas ? Vous me dites qu'ils ont demandé à ce que leur objet sacré fasse l'objet d'une bénédiction chrétienne ; ils doivent donc s'attendre à ce que les choses se déroulent selon nos rites, et non les leurs, je présume... Et quand bien même il leur faudrait des, hum, effets pyrotechniques, comme dans leurs cérémonies à eux, êtes vous bien sûr que les effets auxquels ils pensent puissent être mis en œuvre sans risque dans la cathédrale ?"
"J'en suis pleinement conscient" rétorque Humbertus. "À vrai dire, je pense que l'"illumination" dont il est question est autant spirituelle et métaphorique que visuelle. Ce que je pense, peut-être à tort, car nos invités ont été peu diserts sur le sujet, c'est que les Martiens ne dissocient pas les effets spirituels des effets réels. Par "illumination", que j'ai peut-être hâtivement traduit par "pyrotechnie", je pense qu'ils attendent une forme de climax religieux où ils percevraient, eux qui ne sont pas Initiés au sens de l'Église, l'aboutissement de la cérémonie. Je pense que pour les y aider et accélérer la convergence spirituelle de ce peuple vers les cultes terriens et spécialement celui de l'Église, il n'est pas inconcevable d'introduire une dimension mystico-religieuse dans cette bénédiction."
"Je ne comprends pas très bien où vous voulez en venir" répond Loisy d'un ton perplexe et plutôt chagriné. "Quelle est cette histoire de dissociation entre les effets spirituels et les effets réels ? Les effets spirituels, comme vous dites, SONT réels ! Et "introduire une dimension mystico-religieuse dans la bénédiction" ? Mais que me chantez vous donc là ?" fait il d'un ton énervé. "Auriez vous oublié peut-être que la bénédiction est une cérémonie RELIGIEUSE ? Si c'est un comédien pour une mise en scène vide de sens que vous cherchez, je crains qu'il ne vous faille vous adresser à quelqu'un d'autre ! Quant à moi, il est HORS DE QUESTION que je me prête à une mascarade !"
Humbertus sera finalement dissuadé par ses camarades de mettre en œuvre ses fameux artifices.

Après avoir déjeuné en sa compagnie, les personnages et les Martiens retrouvent Loisy (en soutane) à cinq heures du soir dans le narthex de Notre-Dame, où une messe est en train de commencer. Les Martiens ont accepté de renoncer à leurs habits de cérémonie contre des vêtements moins voyants, et sont tombés d'accord avec le prêtre sur le contenu de la cérémonie, à savoir une bénédiction toute simple accompagnée de prières (Loisy ajoutant un sermon sur l'amitié interplanétaire), le tout se déroulant en une vingtaine de minutes dans la chapelle Saint-Louis, l'une des chapelles latérales de l'édifice.

À l'issue de la cérémonie, le groupe est en train de traverser le parvis de Notre-Dame quand Sneel Asnuun s'écroule brusquement. Ses compagnons se hâtent de l'emmener à l'Hôtel-Dieu tout proche, où le personnel médical ne peut que constater le décès. Profitant de ce que Louis détourne l'attention du médecin, Humbertus parvient à subtiliser l'amulette sur le cadavre.
S'affairant autour du corps dont il va préparer l'autopsie, le médecin découvre dans son dos une petite blessure ronde, ressemblant à une blessure par balle. Pourtant, personne n'avait entendu la moindre détonation.

Le groupe quitte l'Hôtel-Dieu et, laissant Loisy, se retrouve dans l'appartement d'Humbertus. Ce dernier s'occupe de contacter maître Tournier afin qu'il s'occupe de la cérémonie funéraire (suivant les directives de Volaace Zeenkeer), car l'expédition devant embarquer le lendemain, il ne sera pas possible aux personnages de le faire eux-mêmes... pas plus que de se rendre aux éventuelles convocations de la police parisienne pour l'enquête sur ce qui semble bien être un assassinat.
Zeenkeer révèle alors que Sneel Asnuun n'était pas le grand-prêtre, mais un leurre destiné à tromper leurs ennemis. Regardant fixement les personnages, il leur affirme que le véritable grand-prêtre est bien vivant. Il est toutefois manifeste que la mort d'Asnuun, qui était un haut religieux du temple, le bouleverse.
Chacun prend ensuite congé pour cette dernière nuit sur Terre. Volaace Zeenkeer reste bien entendu chez Humbertus, de même qu'Alexandre Noirot, au cas où "quelque chose" se passerait pendant la nuit.

Accompagné d'Etienne Rohmer et suivi à distance et à son insu par Henri (qui souhaite pouvoir intervenir en cas de problème), Aldémar retourne sur les lieux du drame. Les deux hommes déterminent que, si le Martien a bien été victime d'un tir, l'assassin devait se trouver, soit sur le pont au Double, soit sur le quai de l'Archevêché.
Cherchant le moindre indice sur la chaussée, sur les trottoirs et dans les caniveaux, ils examinent le sol. Sur le quai de l'Archevêché, Rohmer découvre un fruit martien non épluché mais à moitié mangé : une gorna.

Rohmer se souvenant d'avoir vu des gornas à l'étalage d'une épicerie martienne du Marais, les deux hommes se rendent sur place. Au passage, ils hèlent un fiacre et Henri, qui est à pied, perd leur trace.
Lorsqu'ils arrivent, la boutique est fermée, vue l'heure tardive, mais en les voyant regarder à travers la vitrine, l'employé martien occupé à ranger le magasin s'approche, les dévisage, semble frappé de stupeur, puis s'enfuit dans l'arrière-boutique. Aldémar se précipite dans une ruelle voisine, juste à temps pour le voir s'enfuir en courant par la porte de derrière. La poursuite dans les ruelles du Marais continue à l'intérieur d'un immeuble, puis sur les toits... jusqu'à ce que le Martien glisse et se tue en tombant sur le pavé.
Une fouille rapide du corps ne fournit pas d'indice sur les mystérieux adversaires des personnages, mais Aldémar fait main basse sur la photo noir et blanc d'une jolie Martienne des canaux.
Interrogé le lendemain, Zeenkeer déclare ne pas connaître la femme en question.

Les personnages, accompagnés de Volaace Zeenkeer et de son amulette, se rendent alors à Issy-les-Moulineaux, au port éthérique de Paris, où ils embarquent à bord du paquebot transéthérique Ville de Syrte.


38 millions de lieues dans l'éther

Ce scénario est basé sur la suite de Canal Priests of Mars.

Le Ville de Syrte quitte la France le vendredi 31 janvier 1890 vers dix heures du matin. Mars se trouvant distante d'environ 208 650 000 kilomètres de la Terre, le voyage devrait durer environ dix à douze semaines.

Sur place, il y a foule : outre les voyageurs et leurs accompagnateurs du dernier moment, une foule de badauds se presse autour du terrain malgré le froid vif. Les départs de navires éthériques attirent toujours les curieux, et le Ville de Syrte plus que tout autre.

Après être passés par le rituel des formalités douanières et administratives, et avoir fait leurs adieux aux deux anciens sous-officiers qui les ont escortés aussi loin que possible, les personnages embarquent par le sas principal, tandis que leurs bagages passent par les soutes.
Guidés par un steward, ils prennent possession de leurs cabines, contiguës et situées sur le deuxième pont, et de la suite de Zeenkeer (qu'il devait occuper avec Sneel Asnuun, et où Henri s'installe par mesure de sécurité, car les personnages craignent de nouvelles tentatives d'agression), sur le pont principal.
Les cabines des professeurs Montazet et Leduc sont situées juste à côté de celles des personnages. Celles de Victor Jambart et des assistants des deux autres scientifiques sont situées un peu plus loin dans le même couloir.
Situées dans la partie la moins large du navire, toutes ces cabines sont pourvues de hublots donnant sur l'extérieur, alors que la suite de Zeenkeer n'a que la porte pour seule ouverture.

Sur la suggestion des stewards, la plupart des passagers se massent dans la baie d'observation à la proue du navire, pour contempler l'incomparable spectacle. La foule des spectateurs est relativement variée. On y trouve aussi bien des gens de la haute société, hommes en haut de forme et redingote et femmes vêtues de coûteuses robes à la mode, que des bourgeois aisés, des militaires en uniforme (partant rejoindre leur garnison sur la planète rouge), quelques enfants accompagnant leurs parents partis s'installer sur Mars, etc... Bien que tous ces gens soient pour la plupart des Français, figurent également parmi eux quelques étrangers : les liaisons interplanétaires sont encore suffisamment peu répandues en dehors des principales puissances colonisatrices pour que les navires français et anglais attirent leur lot de voyageurs venus d'autres pays : ainsi peut on distinguer parmi le brouhaha qui règne dans la pièce les intonations caractéristiques de l'allemand, la sonorité gutturale du russe, les exclamations de l'italien, et peut-être d'autres idiomes encore. Il se trouve aussi parmi les passagers des non Européens : quelques Sénégalais et Annamites qui se repèrent facilement en raison de leur couleur de peau et sont probablement les serviteurs de certains des passagers, et même des Martiens.

Parmi les passagers, on peut remarquer :

Il y a d'autres passagers dans ces deux classes (ainsi bien sûr qu'en troisième classe).

L'équipe s'organise afin que Volaace Zeenkeer ne sorte jamais seul de la suite. De toutes façons, les membres de l'expédition prennent en général leurs repas tous ensemble, et le professeur Leduc en profite pour essayer d'obtenir du Martien des informations sur l'histoire de son peuple (ce que les difficultés de vocabulaire ne rendent pas toujours facile).

Presque deux semaines après le départ, la suite de Zeenkeer, pourtant fermée à clé, reçoit une visite inopportune pendant le repas de midi. Divers objets ont été déplacés, mais rien ne semble avoir disparu.
À la demande d'Henri, et après moult réticences, Zeenkeer accepte de confier l'amulette à Henri ou à Aldémar, mais uniquement lorsqu'il sort de sa suite. Il est clair que se séparer de la précieuse relique, même pour un temps limité, lui coûte beaucoup, et il s'empresse à chaque fois de la récupérer dès qu'il réintègre ses quartiers.
À plusieurs reprises lors des semaines qui suivent, les personnages ont la certitude que leurs cabines (y compris à nouveau la suite) ont été visitées en leur absence, mais rien ne semble avoir été dérobé. Malgré des tentatives variées, ils ne parviennent, ni à coincer le ou les intrus, ni à obtenir des témoignages qui leur permettraient de se lancer sur une piste.

En dehors de ceci, l'évènement le plus marquant à bord est une bagarre entre le capitaine Santon et le lieutenant Kastner, tous deux sous l'emprise de l'alcool. Les stewards, aidés par quelques passagers, parviennent à les séparer sans qu'ils n'aient d'autres blessures que quelques ecchymoses et des vêtements déchirés.
La longueur du voyage commence à taper sur les nerfs de certains passagers (à commencer par les quelques enfants), et tout évènement sortant de l'ordinaire est vivement apprécié. Chacune des représentations du Grand Razzini attire salle comble, et il ne se passe pas une semaine sans qu'un bal soit organisé au son d'un orchestre amateur constitué de certains membres d'équipage.
Il est vrai que les distractions sont rares, et lorsqu'à deux reprises, le Ville de Syrte a croisé d'autres navires éthériques revenant de Mars (un navire prussien et un bâtiment de guerre anglais), la foule s'est à chaque fois, la foule massée dans la baie d'observation pour les regarder.

Cinq semaines environ avant la fin du voyage, alors que les passagers se sont massés devant la verrière pour regarder une comète (spectacle finalement bien décevant, car ce n'est en fait rien de plus qu'un gros bloc de glace grisâtre prolongé par des panaches de gaz auxquels la lointaine lumière solaire confère un éclat blanchâtre ; rien de comparable avec ce que l'on pourrait associer à l'expression étoile filante), un brusque dégagement gazeux de l'astre vient heurter le navire de plein fouet, provoquant un fort roulis. C'est la première fois que le Ville de Syrte se comporte de façon instable, et certaines personnes dans la foule se mettent à paniquer. À l'issue d'une cohue de quelques minutes à peine, le navire ayant repris une assiette stable et laissé la comète derrière lui, les personnages retrouvent Volaace Zeenkeer inanimé sur le parquet de la baie d'observation, parmi d'autres passagers, eux aussi tombés à terre dans la cohue, et en train de se relever en époussetant leurs vêtements.
Se précipitant vers lui, Humbertus et Aldémar remarquent qu'une tache de sang orne le côté gauche de son habit, continuant visiblement à s'étendre, autour de ce qui semble être la garde ornée de pierreries d'une minuscule épée dont la lame serait entièrement plongée dans la poitrine de leur compagnon de voyage.
Pendant que Louis court chercher le médecin du bord, ses compagnons font appel au docteur Bonneaud, qui se trouve à proximité.
Celui-ci examine rapidement le blessé et annonce qu'il doit être opéré de toute urgence. Aldémar et Henri (qui porte sur lui l'amulette) se ruent dans le fumoir voisin pour en ramener une table basse, destinée à faire office de brancard et sur laquelle ils chargent le Martien, tandis qu'Humbertus s'efforce de maintenir les curieux à l'écart. Il ne peut toutefois empêcher la nouvelle que Zeenkeer a été poignardé de se répandre parmi l'assistance.

Personne ne semble avoir remarqué quoi que ce soit de spécial avant que le Martien ne s'effondre. L'ingénieur Hammings déclare qu'il se trouvait juste à côté de Zeenkeer lorsque la foule a paniqué, mais dans la cohue il a immédiatement cherché à repérer son épouse et ne s'est rendu compte de rien concernant l'agression.
Ce témoignage est le plus "précis"... du moins jusqu'à ce que Georges, le jeune fils du député Evrard, que les personnages, se concentrant sur les adultes, n'ont pas interrogé, affirme qu'il a vu une dame toute en noir bousculer le Martien juste avant qu'il ne tombe. En questionnant un peu plus l'enfant (sous la pression relativement courroucée de son père, qui a l'air de penser que le gamin raconte ça pour se rendre intéressant ; d'ailleurs, la preuve n'en est elle pas que lui même n'a rien remarqué, alors qu'il tenait son fils par la main ?), Humbertus obtient de lui quelques maigres précisions : la dame avait un chapeau tout noir aussi, et il n'a pas vu son visage car "le chapeau lui pendait devant la figure" (ce que les personnages interprêtent comme étant la description d'une voilette).

Au moyen de leur brancard de fortune, Henri et Aldémar emportent le blessé jusqu'à l'infirmerie du bord, suivant le docteur Bonneaud qui écarte sans ménagement de ses grosses mains et de sa voix forte les badauds curieux gênant le passage. Là après avoir examiné le Martien et pris l'avis de son confrère, le docteur Maignand déclare que l'état du blessé est très grave, mais que le Ville de Syrte n'est pas équipé du matériel nécessaire pour réaliser l'opération chirurgicale qui s'impose. Il n'ose d'ailleurs même pas retirer l'arme du crime, craignant ce faisant d'aggraver l'état de la victime. Le mieux qu'il puisse faire est de l'hospitaliser dans l'infirmerie et de lui apporter les meilleurs soins palliatifs qui soient en ses moyens. Bonneaud propose aussitôt son aide à son confrère, mais il voyage sans les instruments de sa profession et ne peut fournir que son savoir-faire.
Le blessé ayant besoin du plus grand calme, les médecins congédient les personnages. Ils pourront rendre visite à leur ami, mais de façon réduite ; de toutes façons, dans son état comateux il n'est pas en mesure de percevoir leur présence.

Le capitaine Maré, commandant le Ville de Syrte, arrive à l'infirmerie alors qu'ils allaient en sortir.
Mis au courant de la situation, il invite les personnages à venir dans sa cabine lui expliquer leur histoire. En chemin, il interpelle l'un des officiers du bord et lui donne l'ordre de faire garder l'infirmerie, car il craint que le patient qui s'y trouve fasse l'objet d'une nouvelle tentative d'agression.
Une fois dans le confortable salon du capitaine, décoré de peintures de paysages martiens. Maré, après avoir convié ses invités à s'asseoir dans les fauteuils et leur avoir proposé de goûter son cognac, demande : "Eh bien messieurs, si vous m'expliquiez un peu plus posément ce qui se passe à bord de mon navire ?"
Les personnages lui livrent alors une version à peine édulcorée des évènements survenus depuis leur première rencontre avec les deux Martiens.

Les médecins ont fini par retirer l'arme ayant servi à poignarder le Martien : il s'agit visiblement d'une aiguille à chapeau en forme de fine rapière à la garde ornée de pierres brillantes (des diamants ?). Il est toutefois manifeste que la victime est en train de mourir à petit feu, malgré tous les soins qui lui sont apportés.
Une semaine après l'agression, alors que les personnages se sont rendus ensemble à son chevet, Volaace Zeenkeer semble reprendre connaissance. Il gémit, un son terrible évoquant le lugubre hurlement d'un fantôme dans la nuit, puis marmonne quelque chose d'incompréhensible. Ses yeux s'ouvrent alors lentement, vitreux, le regard d'abord dans le vague, avant de se fixer sur ses compagnons. Il les regarde fixement, tente de lever la tête et murmure d'une voix rauque :
"Allez au temple. Haldon... Haldon... Doit aller au temple. Gaaryan... En sécurité là-bas... À Gaaryan..."
Ses yeux se referment et sa tête retombe d'un bloc sur l'oreiller dont elle s'était décollée de quelques centimètres, tandis qu'un peu de bave rosée sourd à la commissure de ses lèvres. Il ne reprend pas connaissance.
Humbertus déclare qu'ils doivent bien aux deux religieux martiens d'accomplir cette volonté.

Sous la direction du professeur Léontieff, particulièrement contrarié par les évènements, l'équipe procède à sa propre enquête.
Humbertus tente d'obtenir plus d'informations de l'enfant Evrard sous le prétexte d'une leçon d'astronomie, mais le père du garçon semble agacé par l'insistance du professeur à tourner autour de son jeune fils, et la "leçon" ne peut être mise en place. Evrard semble d'ailleurs prendre en grippe Humbertus suite à ses tentatives répétées pour aborder son fils.
La description faite par l'enfant pourrait évoquer une veuve, par exemple madame Christian, qui porte le deuil et sort rarement de sa cabine.
Le sentiment anti-prussien d'Humbertus lui fait également soupçonner l'intervention d'une Prussienne, mais il n'y a apparemment personne de cette nationalité à bord du Ville de Syrte.
Les personnages s'intéressent également aux Martiennes, plusieurs se trouvant à bord, dont mademoiselle Ch'kya qui voyage en deuxième classe ; les autres (dont certaines sont les domestiques d'autres passagers) sont en troisième classe.
Humbertus et Aldémar soupçonnant une manigance du culte du Ver, ils se méfient de tous les Martiens du bord.
Le capitaine refuse de fournir aux personnages la liste des passagers, et leur rappelle que, bien qu'ils soient les compagnons de la victime, ils n'ont aucune autorité officielle ni compétences en matières d'enquêtes policières. Même le prestige militaire d'Aldémar ne suffit pas à le convaincre.

La veuve Christian est habillée en deuil depuis la première fois où les personnages l'ont croisée à bord. Sa tenue est sobre et l'aiguille à chapeau ornée de diamants qui a servi à poignarder Zeenkeer y détonerait.
La jeune veuve passe la plupart de son temps recluse dans sa cabine, dont elle sort principalement pour les repas, ne recherchant pas la compagnie des autres passagers. La seule personne qu'elle fréquente est sa voisine de cabine, mademoiselle Romain, qui lui tient parfois compagnie au bord de la verrière de la baie d'observation, quand il ne s'y trouve pas grand monde.
Humbertus tente d'approcher la veuve en passant par l'intermédiaire de sa compagne de voyage, qui est d'un abord facile, et avec qui il n'a guère de difficultés à engager la conversation. En quelques minutes, le voici emporté dans une visite passionnée de la sphère céleste, nommant tour à tour les astres visibles de la baie d'observation et s'étalant avec délice dans des anecdotes sur les différentes constellations, l'histoire de leur découverte, etc... Avec n'importe quel vieux professeur d'université, ces explications seraient rébarbatives ; mais Humbertus a le don de communiquer son enthousiasme à son auditoire, et mademoiselle Romain n'a pas le moins du monde l'air incommodée, à la surprise quand même de Louis et d'Henri, qui assistent à la scène d'assez loin.
Ne perdant pas de vue son objectif, Humbertus parvient à s'éloigner suffisamment de son sujet de prédilection pour apprendre que mademoiselle Romain accompagne son amie madame Christian sur Mars, cette dernière ayant besoin de se changer les idées suite à la mort tragique (et prématurée) de son jeune époux.
Mademoiselle Romain se trouvait dans la baie d'observation lors du drame, mais elle n'en a rien vu. Quant à madame Christian, elle se trouvait sans doute seule dans sa cabine, occupée à lire.

La plupart des Martiens du bord, à l'exception de l'infortuné Volaace Zeenkeer, de mademoiselle Ch'kya, et des deux sergents des tirailleurs martiens, sont relégués en troisième classe.
Humbertus engage la conversation avec les deux tirailleurs. Ce sont des Martiens des canaux ; mais contrairement à Sneel Asnuun et Volaace Zeenkeer, ils ont abandonné leur antique religion et sont très fiers de se présenter comme convertis au catholicisme. D'ailleurs, ils se présentent comme pleinement français ; les quelques différences physiques (pourtant manifestes) qui les distinguent des métropolitains ne semblent guère constituer un obstacle à leurs yeux, bien que la façon dont ils sont traités par la plupart des blancs à bord montre bien qu'il existe une différence et qu'ils ne sont au mieux que des individus de deuxième ordre. Ils s'expriment dans un français quelque peu laborieux, tout en fumant des cigarettes.
Humbertus leur ayant demandé ce qu'ils pensent du Culte du Ver, ils s'exclament avec véhémence qu'il s'agit d'une abomination... Mais à quoi s'attendre de mieux de la part de ces barbares hauts Martiens ! Il est également manifeste que pour eux la religion des canaux est une religion païenne et qu'ils sont heureux et fiers de s'être convertis au catholicisme, dont ils espèrent qu'il va vite supplanter ces vieilles superstitions. Enfin, ils ne connaissaient pas Sneel Asnuun et Volaace Zeenkeer, même de nom.

Ce n'est que deux jours plus tard qu'Humbertus parvient à entamer la conversation avec la charmante mademoiselle Ch'kya. Celle-ci lui apprend, dans un français très correct, qu'elle travaille comme traductrice au musée de l'Homme, après être venue à Paris suite à une liaison avec un officier français (tué pendant une insurrection dans un territoire nouvellement annexé à la colonie française sur Mars). Elle retourne à Syrte car elle a récemment appris la mort de son oncle et désire réclamer sa part d'héritage. Elle aussi déclare avoir abjuré la religion des canaux et s'être convertie à la foi catholique "car les missionnaires m'ont ouvert les yeux", et elle aussi considère la religion des canaux comme une pratique païenne vouée à disparaître, et le culte du Ver comme une horreur sans nom.

Le soir même de la discussion entre Humbertus et mademoiselle Ch'kya, le docteur Maignand annonce aux personnages le décès de Volaace Zeenkeer.
Le père Malter célèbre un office funèbre, puis la dépouille de l'infortuné Martien, enroulée dans son linceul, est lâchée dans l'espace par le sas. Elle dérive quelques temps au gré d'un courant éthérique, mais le navire poursuit sa route et elle n'est plus bientôt qu'un minuscule point blanc qui finit par disparaître dans l'obscurité spatiale.
Les personnages étant les seuls proches du défunt, le capitaine Maré leur confie ses possessions.

Le style du bijou meurtrier, orné de diamants, amène les personnages à s'intéresser à mademoiselle Devers.
Celle-ci porte effectivement divers bijoux ornés de diamants, dans le style de la funeste aiguille à chapeau en forme de rapière.
Humbertus aborde habilement le sujet. Hautaine, mademoiselle Devers nie catégoriquement (avec l'accent de la haute société) posséder un tel bijou. Visiblement, prolonger la discussion avec son interlocuteur ne l'intéresse pas le moins du monde, il est même manifeste que cela l'importunerait.

Plus tard, Humbertus est abordé par Van Hofman. Celui-ci a assisté à la précédente discussion et, sans vouloir être indiscret, il n'a pu s'empêcher de l'entendre à défaut de l'écouter. Or il se souvient bien d'avoir vu la petite rapière fichée dans l'un des chapeaux de mademoiselle Devers dans les premiers jours du voyage. La forme inhabituelle du bijou l'avait frappé, "car après tout, les diamants, c'est mon domaine". Humbertus lui fait examiner l'arme du crime, et le diamantaire déclare, avec son accent néerlandais : "Ce bijou est de pacotille. Ce ne sont pas des diamants ; ceci est du verre taillé."
De plus en plus soupçonneux envers mademoiselle Devers, les personnages pénètrent par effraction (mais en finesse) dans sa cabine, pour y mener une fouille rapide qui ne donne rien. En particulier, il n'y a pas de robe noire ni de chapeau noir à voilette, qui auraient pu lui servir à se déguiser en veuve pour assassiner Volaace Zeenkeer.
Pensant que quelqu'un cherche peut-être à faire porter les soupçons concernant l'assassinat de Volaace Zeenkeer sur mademoiselle Devers, en utilisant une réplique de pacotille d'un de ses bijoux, les personnages continuent leurs investigations. Humbertus aborde sa femme de chambre, Suzanne, au détour d'une coursive, alors qu'elle vient de se faire violemment réprimander par sa maîtresse et qu'elle sort de la cabine de celle-ci, les traits tirés et presque les larmes aux yeux.
Visiblement heureuse de trouver quelqu'un d'agréable à qui parler, la pauvre bonne raconte ses misères à Humbertus qui la console et l'emmène discuter dans un endroit tranquille du navire. Elle est au service de mademoiselle Devers depuis un peu moins d'un an, elle est traitée comme une moins que rien, presque aussi mal que les chiens de "madame", réprimandée pour un oui pour un non, à tout bout de champ, payée une misère, et encore, avec de fréquentes retenues sur son salaire ; elle regrette de ne pas avoir donné sa démission mais elle a peur de peiner à se recaser ensuite car "madame" a le bras long. Elle regrette aussi ce voyage vers Mars, une planète sauvage où elle ne connait personne et qui lui fait peur. Elle regrette encore d'avoir quitté son petit village normand pour se rendre à la ville. Elle regrette de n'avoir personne de sympathique à qui parler à bord. Bref, elle vide son sac... Sans fournir d'information utile.

Les personnages poursuivent leur enquête en cherchant du côté des gens qui se sont renseignés auprès de l'équipage au sujet de leur infortuné compagnon. Quelques passagers ont effectivement demandé au steward qui était ce Martien qui voyageait en première classe (puisque c'était le seul non Terrien dans ce cas) ; de la même façon qu'ils s'étaient renseignés sur les Martiens voyageant en deuxième classe et sur le domestique vénusien du capitaine Bareuil, Rothera. Mais comme le steward n'a pas pu leur dire grand chose de plus que son nom et le fait qu'il s'agit d'un dignitaire d'une religion martienne, ils n'ont pas pu apprendre grand'chose de cette manière. Et personne n'a posé de questions plus avant.

En dehors des membres de l'expédition, Volaace Zeenkeer fréquentait à l'occasion la femme de l'ingénieur américain Hammings, et de ce fait, Hammings lui-même. D'ailleurs, ce dernier était à côté du Martien lorsqu'il a été poignardé.

Cherchant désespérément des pistes, Humbertus envisage d'associer des passagers "de confiance" à l'enquête, comme mesdemoiselles Romain et Ch'kya. Mais il ne franchit pas le pas.

L'enquête ne produit aucun résultat, et est vue d'un mauvais œil par le capitaine Maré. Cependant, les fouilles des cabines des personnages en leur absence ont cessé depuis qu'ils se sont mis à poser des questions à un peu tout le monde...
Mais en regagnant leurs cabines la veille de l'arrivée à Syrte, ils ont cependant la désagréable surprise de retrouver leurs affaires entièrement sans dessus dessous : les fouilles ont repris, et le ou les intrus ne s'embarrasse(nt) plus de discrétion : tout a été sauvagement vidé sur le plancher. Apparemment, rien n'a été dérobé.
En discutant avec Hugues Hammings, les personnages apprennent qu'il a vu sortir de la suite une femme martienne vêtue d'une robe noire et portant un chapeau à voilette. Comme Humbertus en particulier a pas mal fréquenté les Martiens du bord, cela n'a pas particulièrement surpris l'Américain sur le coup, mais il se rappelle maintenant que la femme a vite tourné la tête en le voyant et s'est éloignée rapidement.
Les personnages se lancent aussitôt à la recherche d'une personne correspondant à ce signalement, mais sans succès ; et les rares personnes rencontrées n'ont pas vu cette personne, ni ce soir, ni précédemment pendant le voyage.
Malgré les questions d'Humbertus, Hammings n'a pas su décrire plus précisément l'inconnue ; semblant mal à l'aise devant l'insistance acharnée de son interlocuteur, il ne peut que fournir des éléments peu utiles, comme le fait que la femme avait des cheveux brun sombre (ce qui est le cas de beaucoup de Martiens) assez longs, et qu'elle était mince et de taille assez grande.

Humbertus suggère alors de tendre une embuscade dans la suite, dans l'éventualité d'un retour de la mystérieuse visiteuse. Le prétexte est l'organisation d'une veillée funèbre à la mémoire de l'infortuné Zeenkeer, disposant la boîte de l'amulette comme appât sur l'autel martien érigé par le religieux au début du voyage dans le salon de la suite, et laissant ouverte la porte toute la nuit. Le piège fait appel à diverses substances chimiques et effets pyrotechniques.
Pendant que les personnages sont présents dans la pièce, plusieurs personnes viennent rendre hommage au défunt : les professeurs Montazet et Leduc, le capitaine Maré et le docteur Maignand, plusieurs stewards, le docteur Bonneaud, les Hammings, mademoiselle Romain (qui fait un sourire à Humbertus avant de détourner la tête), le père Malter, mademoiselle Ch'kya, et les deux tirailleurs martiens. Tous se recueillent un moment devant l'autel, puis se retirent, parfois après avoir échangé quelques mots avec les personnages.
Vers onze heures du soir, seuls dans la suite, ces derniers s'embusquent dans les chambres et organisent leur garde.
Vers deux heures du matin, Humbertus et Aldémar perçoivent l'entrée d'une personne dans la suite pourtant plongée dans l'obscurité. Après une longue attente, car ils craignent d'intervenir trop tôt et de permettre à leur proie de s'enfuir, ils bondissent tous les deux dans le salon qui s'illumine en même temps violemment mais fugitivement d'un flash que Louis vient de déclencher.
À la lueur de l'éclair, tous voient très distinctement une silhouette vêtue d'une robe noire et coiffée d'un chapeau de la même couleur, en train de se redresser à quelques pas devant l'autel. Elle croise instinctivement les bras devant son visage pour protéger ses yeux de la lumière aveuglante qui vient d'éclater. Aldémar et Humbertus en profitent pour se jeter sur elle, tandis que Louis éclaire la scène au moyen d'une lanterne. L'intrus se débat énergiquement, poussant des cris dans une langue qui est probablement martienne. Dans la mêlée, son chapeau à voilette tombe, révélant les traits de mademoiselle Ch'kya !
Alors qu'Humbertus et Aldémar tentent de maîtriser l'ultra-mondaine qui se débat en leur crachant au visage et en poussant des imprécations agressives et sonores dans une langue martienne incompréhensible, une autre silhouette vêtue de noir (en pantalon) fait irruption dans le vestibule et accourt vers eux, un nasha'ïr dans la main droite. C'est un haut Martien !
Louis lui projette violemment une chaise au visage, brisant son assaut, avant de s'avancer courageusement, armé de l'un des trépieds de ses appareils photo. Le sauvage se jette sur lui, et le trépied repousse de peu la redoutable lame.
Tout en tentant de maintenir une prise ferme sur la prisonnière, Aldémar la lâche d'une main pour brandir son revolver, mais il n'ose pas tirer, craignant de blesser Louis, et la Martienne en profite pour se débattre de plus belle. Il y a un bruit de course dans la coursive.
Tandis qu'Humbertus maintient d'une poigne ferme la Martienne en furie, Aldémar pointe son revolver vers l'assaillant que Louis tente tant bien que mal de tenir à distance, et fait feu. Touché en pleine poitrine, l'extraterrestre pousse un hurlement rauque et s'effondre.
"Misère !" s'exclame Aldémar, visiblement contrarié. "J'avais visé l'épaule ! Je voulais juste l'immobiliser !"
À peine le coup de feu a t'il résonné que mademoiselle Ch'kya, se raidissant brusquement, cesse de se débattre et de vociférer.
Louis se penche prudemment sur le corps de son assaillant dont il constate la mort. Il n'y a plus aucun bruit dans la coursive, et personne n'a répondu aux appels à l'aide d'Humbertus qui, aidé d'Henri, ligote mademoiselle Ch'kya.
Le haut Martien, vêtu d'un costume noir bon marché, était pieds nus, ce qui permet de voir ses gros orteils opposables, dont les ongles ressemblent vaguement à des griffes. Son nasha'ïr est tombé au sol à proximité du corps. Ses poches contiennent une cordelette de cuir tressé longue d'environ 80 cm, quelques billes métalliques, un caillou jaunâtre allongé à bords arrondis (long d'environ 10 cm selon son grand axe), un morceau de fil de fer assez épais, enroulé, et un étui d'allumettes au nom d'un hôtel parisien. Autour du cou, il portait une chaîne avec un médaillon, semblable à celui que portait le haut Martien qui s'était introduit chez Humbertus : l'un des symboles du culte du Ver.

Il est peu probable qu'il ait voyagé tout seul, puisqu'il s'agit d'un haut Martien, c'est-à-dire d'un sauvage. Soit il accompagnait quelqu'un, soit il se trouvait à bord clandestinement. Cette dernière solution est la plus probable, car la présence d'un haut Martien à bord aurait fait quelque peu sensation, et sans doute attiré des gens avides de bénéficier d'un avant-goût d'exotisme, quelques mois avant de débarquer sur Mars...

Quelques instants plus tard arrive Hugues Hammings, armé d'un revolver. Après les premières explications des personnages, il part chercher le capitaine, accompagné d'Henri qui souhaite vérifier qu'il n'y a pas d'autre Martien dans les coursives proches, et Aldémar referme la porte derrière eux.
Humbertus et Louis profitent de l'absence de l'Américain pour examiner un peu mieux les objets trouvés sur le corps : la cordelette est une simple tresse à trois brins, assez fine mais qui parait souple et résistante ; le caillou est friable et laisse une marque jaune sur les doigts d'Humbertus quand il le manipule : il s'agit certainement d'une roche d'origine martienne, et le professeur, tout excité par cette découverte, se met à l'examiner dans tous les sens, essayant d'en déterminer la dureté en le passant sur différents matériaux pour voir s'il les raye ; la boîte d'allumettes porte les couleurs de l'hôtel où les deux religieux martiens étaient descendus (!) ; le médaillon est en métal, probablement en argent ; les billes métalliques proviennent peut-être d'un roulement à billes : elles n'ont rien de particulier, pas plus que le fil de fer, si ce n'est leur valeur plus élevée sur Mars où le métal est beaucoup plus rare que sur Terre.

La fouille de la prisonnière n'apporte pas grand chose, à part quelques clés, un mouchoir fait d'un fin tissu probablement de facture martienne, une petite bourse contenant des pièces de monnaie martiennes, une petite boîte d'allumettes, et quelques petites feuilles (de plantes) tellement sêches qu'elles s'effritent à peine touchées. Elle est vêtue d'une robe noire ornée d'une broche en or, coiffée d'un chapeau noir dont la voilette s'est arrachée dans la lutte, porte de fins gants noirs et une paire de bottines de la même couleur.
Constatant qu'elle est solidement maintenue, et après avoir copieusement invectivé les personnages dans une langue martienne, elle leur crache à la figure dans un français peu distingué sa haine envers eux, envahisseurs d'outre-monde, profanateurs de sites sacrés, et alliés des prêtres des canaux. Elle finit sa tirade en leur faisant remarquer qu'ils seront bientôt sur Mars, et que là, "nous serons en position de force". "Quoi qu'il arrive, Haldon mourra !" conclut-elle sur un ton haineux et avec un regard mauvais.

Henri et Hugues Hammings reviennent, accompagné du capitaine Maré qu'ils ont visiblement tiré du sommeil et dont l'uniforme est moins impeccablement mis qu'à l'accoutumée.
"Eh bien, que s'est il donc passé ici ?"

Les personnages lui expliquent la situation. Maré tente d'obtenir la version de mademoiselle Ch'kya, mais cette dernière s'obstine dans un mutisme renforcé par les regards chargés de haine qu'elle leur lance. Il décide de la faire enfermer dans sa cabine, avant de la remettre aux autorités à Syrte, et, à la demande des personnages, fait poster un garde devant la porte, pour empêcher toute fuite. Quant au corps du haut Martien, Maré, surpris de la présence à bord d'un tel individu, le fait porter à l'infirmerie. L'amarsissage étant prévu pour le lendemain, le corps sera peut-être encore utilisable pour la police, à des fins d'identification (même si le capitaine a quelques doutes quant à l'intérêt de ceci...).

Après tout ce remue-ménage, les personnages regagnent leurs cabines et se couchent.

La nuit se termine sans incident. Au matin, le navire grouille d'effervescence devant la prochaine arrivée à son terminus. Les passagers se pressent dans la verrière pour admirer le spectacle de la planète rouge.
Le Ville de Syrte commence sa descente. Assez vite, les passagers sentent la température s'élever notablement : ils ne sont plus dans le froid de l'éther, mais dans la chaleur de l'atmosphère martienne. Des détails de plus en plus réduits deviennent discernables : montagnes ocres, canaux entourés de leur bande de végétation, bientôt des villes et des villages. Et au milieu de tout ça, Syrte, une ville qui autrefois fut l'une des plus puissantes de la planète, mais qui n'est presque plus désormais qu'un vaste champ de ruines, d'où émergent ça et là des tours partiellement conservés qui montrent à quel point l'architecture martienne fut imposante du temps de sa splendeur. La seule partie à peu près intacte de la cité se trouve en son centre, là où confluent les neuf canaux qui l'irriguent. Cette zone correspond à la citadelle, c'est-à-dire à la partie encore défendable de la ville en cas de siège ; mais en fait, il ne s'agit pour l'essentiel que d'une partie pas trop abîmée de l'immense palais princier, qui s'étendait autrefois sur plusieurs dizaines d'hectares. C'est là que les Martiens des canaux qui vivent encore dans la ville se sont rassemblés, pour mieux se mettre à l'abri des incursions des nomades des déserts alentour, et c'est là aussi que les Français se sont installés.
Dans cette zone habitée, émergent des masses vertes qui correspondent à des étendues dégagées de leurs ruines, ou à d'anciens parcs : ce sont les cultures vivrières des habitants, mais aussi, comme l'indique Henri, le parc de la résidence du gouverneur général. De larges rues à la chaussée ocre longent les berges des canaux. On distingue le trajet ovalaire de la muraille d'enceinte, ainsi que, au delà, les emplacements concentriques des anciennes murailles, abandonnées les unes après les autres au fur et à mesure du repli de la ville sur son centre.
Des gens et des animaux deviennent visibles, d'abord petits points sombres contrastant avec les tons jaune-rougeâtre des rues et des bâtiments, puis de mieux en mieux visibles alors que le navire survole l'un des canaux pour gagner l'étherodrome, grande étendue vide un peu excentrée au sein de la citadelle. Quelques navires y sont déjà posés, dont visiblement un cuirassé en train de subir des réparations. Il y a aussi quelques petits navires volants en bois d'anémonier, cette essence qui défie les lois de la gravité et permet aux Martiens de sillonner les airs de leur planète.
Et, dans un grand tourbillon de poussière, le Ville de Syrte s'affale sur la berce prévue pour le recevoir. Les personnages sont arrivés sur Mars.


Syrte, nous voici !

Ce scénario est basé sur la suite de Canal Priests of Mars.

Accompagnés par le lieutenant Chary, second du Ville de Syrte, les personnages se rendent auprès des autorités coloniales pour y faire leurs dépositions concernant les évènements tragiques s'étant déroulés lors du voyage. Ils sont les premiers passagers à descendre les marches de l'échelle de coupée et à fouler le sable du terrain d'amarsissage. La chaleur du jour martien leur frappe agréablement la peau, tandis qu'une légère brise porte à leurs narines les fragrances inhabituelles de ce nouveau monde : odeurs d'épices, parfums de plantes, et d'autres composantes indéfinissables. Même Henri, pour qui ce n'est pas une nouveauté, se sent détendu en s'exposant à ces sensations, nouvelles pour ses compagnons. D'ailleurs pour ces derniers, tout est source d'émerveillement.
Pendant que de nombreux manutentionnaires martiens s'affairent autour du navire, pour l'amarrer correctement et décharger sa cargaison, l'équipe suit Chary vers un bâtiment martien situé visiblement à l'entrée du terrain. Le bâtiment en question n'a pas été épargné par la déréliction qui affecte les villes martiennes, et il est visible qu'il était autrefois nettement plus haut. Ses ailes sont en ruines aussi, mais la partie encore à peu près intacte reste assez imposante. Sur la façade, un drapeau tricolore claque fièrement au vent, au dessus de lettres dorées indiquant Capitainerie - Douanes.
Une fois à l'intérieur, la relative fraîcheur fait prendre conscience aux visiteurs de la chaleur qui règne dehors. Mais ce n'est rien à côté du contraste visuel qui les frappe : un instant plus tôt, ils étaient sur une planète étrangère, et là, ils pourraient presque se croire de retour en France...
Les personnages font séparément leurs dépositions, et l'inspecteur leur déclare d'un ton désabusé : "Eh bien, je crois que l'affaire est claire... Le coupable est certainement cette Ch'kya, ou son acolyte... Vous avez bien fait de l'éliminer ! Ces fanatiques hauts Martiens sont une véritable nuisance pour les colons... Eh bien, je vais envoyer des hommes prendre en charge la prisonnière et le corps. Quant à vous messieurs, vous pouvez aller. La justice vous remercie pour votre coopération."

Après avoir récupéré leurs bagages et pris congé des gens avec lesquels ils ont passé les trois derniers mois, les membres de l'expédition, décident de s'établir à l'Hôtel de Paris, un établissement respectable situé au cœur du quartier français, afin de préparer l'expédition vers le temple de Gaaryan.
Henri hèle deux fiacres pour transporter l'expédition. Les voitures, conduites par des Martiens des canaux, sont tirées, non par des chevaux (qui s'acclimatent plus ou moins bien aux conditions locales), mais par quatre gashants. Traversant quelques rues dans lesquelles circule une foule colorée, bruyante et animée, Martiens des canaux, Terriens, gashants et autres animaux indigènes, ils arrivent sans encombre à l'hôtel, où chacun prend possession de sa chambre au premier étage. Il est bientôt midi, quand un jeune coursier échevelé apporte un pli signé du capitaine. L'ouvrant, les personnages découvrent avec stupeur que l'homme d'équipage de faction devant la cabine de la prisonnière a été retrouvé mort, sauvagement poignardé par derrière, et que la Martienne a bien entendu disparu. Maré les informe en outre que la police souhaitera probablement les interroger un peu mieux, et les prie de ne pas quitter Syrte pour l'instant.
Peu après le repas de midi, un agent de police en uniforme vient les prier de l'accompagner au commissariat. Là, ils sont à nouveau interrogés, et on leur soumet une série de photographies de femmes martiennes, en leur demandant s'ils reconnaissent la suspecte parmi elles, mais ce n'est pas le cas. L'exercice meuble une partie importante de l'après-midi. En repartant, les personnages passent devant Hammings et quelques membres de l'équipage du Ville de Syrte, qui attendent visiblement leur tour pour être interrogés.
En regagnant l'hôtel, Aldémar frappe soudain violemment le sol avec sa canne. "Bon sang !" s'écrie t'il, "ces photographies me rappellent que..." et portant sa main à sa poche, il en extrait fébrilement son portefeuille, dans lequel il fouille avec excitation, avant d'en sortir une photo d'une Martienne, celle ramassée sur le corps du Martien qui s'est tué en tombant d'un toit parisien alors qu'il le poursuivait.
Et sur la photo en question, qui dormait dans son portefeuille depuis le départ de Paris, tous ont la surprise de découvrir les traits de mademoiselle Ch'kya, habillée à la mode de Paris (pour autant que l'on puisse en juger en ne voyant que son buste). Au dos de la photographie, figure le cachet du photographe, un certain David Garnier, de Syrte.


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